Le bouc émissaire dans les familles narcissiques, un mouton noir qui dérange
Publié le
3 août 2025
par Mathilde Carrée

Le bouc émissaire, un coupable tout trouvé
Vous êtes-vous déjà senti comme un bouc émissaire ? Malgré les sourires de circonstance, chaque famille est porteuse de tensions, de conflits tacites et de blessures non cicatrisées. Toutes ces choses ne disparaissent pas comme ça. Elles ont besoin d’un endroit où aller. Dans les familles dysfonctionnelles à caractères narcissiques, une personne se retrouve, à son insu, à remplir cette fonction pour maintenir l’équilibre et éviter l’effondrement familial. Lorsque des conflits éclatent, au lieu de s’attaquer à la cause profonde, la famille préfère rediriger la tension sur un seul membre, qui en devenant le bouc émissaire, devient la soupape de sécurité. Telle une victime expiatoire, le bouc émissaire offre l’avantage au groupe de se laver symboliquement de toutes ses fautes, de se purifier et de se sentir meilleur.
Être désigné comme bouc émissaire est perturbant, cela façonne la façon dont on se voit, la façon dont on évolue dans le monde, jusqu’à la façon de se sentir dans les relations en général. Nous allons explorer cette blessure, qui, bien qu’elle soit invisible à l’œil nu, laisse des traces profondes dans l’âme humaine.
Se retrouver à incarner l’ombre que les autres ne veulent pas voir en eux : une douleur incomprise
Avec l’âge adulte, les rôles prédéfinis pendant l’enfance - enfant chéri, médiateur, bon petit soldat, rebelle, fragile, bouc émissaire - se sont fossilisés. Ils sont devenus des prisons qui inhibent l’expression de soi dans le cercle familial, mais pas seulement là, à l’extérieur aussi. Telle une identité parfaitement apprise, ces rôles finissent par se naturaliser, tant et si bien qu’ils se confondent avec la personnalité authentique, créant une confusion profonde sur qui sont réellement les personnes. Dans les familles narcissiques, qu’il y ait un individu pervers narcissique ou pas, un membre de la famille est systématiquement désigné comme bouc émissaire pour servir aux autres de défouloir et pour leur permettre de se sentir ok avec leur conscience. La personne implicitement désignée comme tel, est injustement accusée dans le but de protéger la réputation, les privilèges et les croyances d’un ou de plusieurs autres membres de la famille, à caractère narcissique plus ou moins sévère. Dans cette configuration familiale anormale, autant le dire, clairement pathologique, le bouc émissaire est tenu pour responsable de la plupart des dysfonctionnements et problèmes familiaux qu’on peut lui coller sur le dos. Ce que l’on ne veut pas voir en soi, on le lui refile. A son insu, il est désigné pour porter les fardeaux, parfois depuis sa naissance, mais il arrive aussi que cela se mette en place plus tardivement, une fois que la personne est devenue adulte.
Un « mauvais rôle » qui brise l’estime de soi
Pour une personne désignée comme bouc émissaire par sa famille d’origine, il est extrêmement difficile de se considérer comme intrinsèquement bonne, digne ou aimable, surtout si le processus a commencé dans l’enfance. Se ressentant comme s’il n’y avait en elle, rien de précieux, son estime de soi est sévèrement mise à mal car elle introjecte en elle-même le discours toxique de ceux qui la blâment, appuyé par les autres membres qui ferment les yeux ou qui deviennent complices, parfois sans même s’en apercevoir. Ce contexte est d’autant plus perturbant sur le plan psycho-affectif, qu’il est instauré par des personnes en qui la victime devrait théoriquement pouvoir placer sa confiance et sa sécurité affective. La personne qui incarne le rôle du bouc émissaire est une victime isolée, non reconnue et incomprise, qui, pour aller bien, a besoin d’être reconnue dans sa vérité. Il lui faut comprendre la complexité de la dynamique familiale qui est à l’œuvre et prendre la juste mesure des répercussions qui en résultent, notamment sur sa propre personne. Elle pourra ainsi se distancier, au moins moralement, physiquement si cela s’avère nécessaire et se reconnecter à son identité personnelle et à ses valeurs qui, malheureusement, n’intéressent pas grand monde dans le clan familial.
Sauver les apparences avant tout
Dans une famille narcissique, le bouc émissaire est la personne qui, de façon non avouée, est désignée par l’ensemble du clan pour porter un fardeau que personne d’autre ne veut, ni reconnaître, ni assumer. La personne est considérée comme l’élément perturbateur. On l’accuse d’être un fauteur de troubles, de ne pas respecter les valeurs et les règles familiales, d’être déloyal, dur, égoïste, d’être trop là, pas assez là. On peut lui reprocher tout et son contraire parce que les reproches ne s’alignent pas sur la vérité. Ils sont l’expression des besoins égotiques des personnes dominantes et le reflet de leurs angoisses refoulées. Cette étiquette de fauteur de troubles attribuée à l’un des membres de la famille, est également véhiculée vers l’extérieur, ce qui a pour avantage de magnifier socialement l’image de la famille tout en maintenant une apparence idéalisée de celle-ci. C’est finalement une façon de dire, sans le dire : « Regardez comme nous sommes une famille formidable ! Oui, c’est vrai, nous avons des problèmes mais c’est seulement parce que untel nous porte préjudice ». Cela laisse entendre que sans la brebis galeuse, la famille se porterait parfaitement bien, elle pourrait être heureuse et revendiquer sa bonne entente. Malheureusement, cette image d’Épinal affichée et entretenue avec milles précautions pour maintenir l’illusion de la famille soudée, contribue à perturber le bouc émissaire en usant du gaslighting (déboussolage mental) et de détournements cognitifs amenant la personne à se sentir perdue et incomprise, non seulement dans sa famille, mais aussi par l’entourage
Quelques critères indiquant que l’on est potentiellement le bouc émissaire dans sa famille d’origine (nul besoin de remplir tous les critères pour être concerné) :
- Vous vous sentez seul et isolé en présence des autres personnes de la famille.
- Vous avez l’impression d’être un étranger au sein de votre famille.
- On vous accuse soit ouvertement, soit par des sous-entendus mais dans tous les cas, vous n’arrivez pas à comprendre la logique des reproches qui vous sont faits.
- Vous remarquez que l’on fait porter sur vous des attentes injustifiées, inappropriées et disproportionnées.
- On vous tient souvent pour responsable en occultant des paramètres qui n’intéressent personne d’autres que vous.
- La plupart des membres de la famille refusent de se remettre en question et éludent vos observations. Ils sont sur la défensive à la moindre remarque.
- Vous êtes la cible de sarcasmes désobligeants, de jugements hâtifs ou de regards dédaigneux.
- On ne vous félicite jamais.
- Il n’y a pas de saine curiosité à votre égard.
- Vos idées et opinions sont balayées d’un revers de main.
- Vous êtes celui qui doit s’adapter aux décisions des autres, votre avis n'a pas de poids dans les décisions communes.
- On ne vous intègre pas dans les conversations intéressantes, vous êtes tenu à l’écart, on chuchote quand vous vous approchez.
- Peu importe ce que vous faites, cela ne suffit jamais.
- Vous n’êtes pas convié à certaines activités familiales ou bien vous êtes prévenu au dernier moment.
- Vous vous sentez comme un étranger au sein de votre famille.
- Vos pensées, vos émotions, vos sentiments ne sont pas pris en compte. On ne vous donne pas l’occasion de les exprimer. Quand vous le faites, vous vous sentez saugrenu ou déplacé.
- Lorsque vous avez besoin de soutien, vos proches familiaux ne prennent pas la mesure de vos besoins.
- Ils ne se réjouissent pas avec vous de vos moments de bonheurs, cela semble les laisser indifférents.
- Vous vous apercevez qu’il vaut mieux ne pas faire étalage de vos réussites.
- Vous vous sentez souvent en porte-à-faux sans trop savoir pourquoi.
- Les cadeaux que l’on vous faits ne correspondent ni à vos gouts, ni à vos besoins.
- Vous ne ressentez ni chaleur ni enthousiasme.
- Lorsque vous vous affirmez, même de façon saine, cela s’ensuit de représailles.
- Lorsque vous vous plaignez de préjudices à votre encontre, les autres membres relativisent systématiquement et vous font comprendre que vous voyez le mal partout.
Le chercheur de vérité, désigné comme bouc émissaire
La faute principale imputée au bouc émissaire - mais qui ne sera jamais admise - est de vouloir penser par lui-même. En fait, si la personne désignée comme « mouton noir » dérange tant que cela dans son cercle familial, c’est parce que sa manière d’être et sa façon de penser à caractère empathique et intuitif, sont perçues par les autres, comme un risque. Contrairement à ce qu’il serait logique de croire, sa sensibilité et sa soif de justesse ne plaisent pas. Il est probable qu’autour des tablées familiales, d’aucuns jouent la carte de la fragilité obtenant ainsi quelques commisérations, d’autres racontent leurs dernières fiertés encouragées par quelques oreilles attentives qui jugent pertinent de faire alliance avec les plus forts. Mais tout ça, au fond, ce ne sont que des masques, des rôles de façades pour éviter d’avoir à assumer des sentiments ambivalents comme la jalousie, la vulnérabilité, la gêne ou le désabusement, que l’on essaie tant bien que mal de refouler. Comme une scène qui se rejoue à l’infini, chacun participe à sa manière en jouant le rôle pour lequel il est attendu. Ainsi faisant, on a une place dans le clan et d’ailleurs, tant que le rôle, est tenu il est possible de se sentir aimé.
Une quête d’authenticité mal accueillie
La capacité du bouc émissaire à voir clair, le pousse à questionner l’ordre établi en dénonçant des dysfonctionnements qui jusque-là avaient été niés, ignorés, banalisés, excusés et normalisés. Pas étonnant qu’il embarrasse ! On préférerait, qu’il encaisse sans résistance à l’instar d’un bon petit soldat qui fait ce qu’on lui dit sans se poser de questions. Ses tentatives pour parler vrai, son désir de transparence, sa tendance à vouloir s’améliorer, sont vues comme une volonté délibérée de semer la zizanie. Bien que ce ne soit pas son intention, il agace, pire, il exaspère. Contrairement aux autres membres, il cherche à comprendre le pourquoi de son malaise et réalise qu’avec ses proches, il lui est impossible d’être pleinement lui-même, sans qu’ensuite, il y ait des représailles. Il s’interroge aussi sur les bizarreries observées. Parfois, il se risque même à dire tout haut ce qui ne tourne pas rond dans l’enceinte familiale. En général, à ce stade, il n’a pas encore pleinement pris la mesure de la nocivité en place et de toutes les conséquences qui en découlent. Se fiant à ce qui est exprimé et montré, et dans sa difficulté à admettre que les apparences peuvent être trompeuses, il a encore envie de croire que chacun souhaite le bonheur des autres.
En résumé, ce qu’il faut retenir
Si vous êtes concerné et que vous vous reconnaissez dans le rôle du bouc émissaire, il est important pour vous, d’intégrer pleinement que vous portez le poids des dysfonctionnements collectifs en devenant le réceptacle des émotions que les autres membres de la famille ne savent pas affronter en eux-mêmes. Si vos parents ressentent de la honte, vous devenez celui qui porte la honte, si votre famille ressent de la colère, vous devenez celui qui est en colère, si l’un de vos ainés se sent incompétent, vous serez dépeint comme un échec. C’est injuste, mais c’est ce dont ils ont inconsciemment besoin et c’est plus fort qu’eux. Ils vous ont définis dans le rôle qui consiste à être le miroir reflétant ce que la famille ne peut pas accepter en elle-même. C’est vous qui avez été désigné parce que votre conscience vous empêche d’être comme eux. Pour ne pas en être déstabilisés, vous devenez, dans leurs yeux, ce qu’ils ne veulent pas reconnaître en eux.
Que faire, quand on est désigné comme bouc émissaire par sa famille ?
Dès lors que vous vous rendez compte que vous êtes désigné comme bouc émissaire, il ne sert à plus à rien de s’appliquer à rentrer dans un moule qui n’est pas à votre mesure. D’une part parce que cela est un risque pour votre santé physique et mentale et d’une autre part parce que plus vous essaierez d’être gentil, plus ce que vous récolterez sera violent. Dans la mesure du possible, soyez vous-même sans en faire plus que nécessaire, cependant, si faire cela n’est plus possible, alors vous allez devoir apprendre à vous détacher. Se détacher, cela ne consiste pas à s’endurcir pour devenir insensible ou indifférent. Il s’agit d’apprendre à ne plus être dépendant de sa famille pour savoir qui l’on est. Il s’agit de reconnaître sa propre valeur pour se donner le droit de mener sa vie comme on l’entend sans éprouver de culpabilité à la moindre remarque. Il s’agit de cesser de s’identifier au rôle réducteur que l’on a fabriqué de toute pièce pour vous et qui vous empêche d’être vous-même. Il s’agit de se guérir de la croyance que l’on a fait quelque chose de mal. De toute façon, dites-vous bien qu’il n’y a pas de retour possible. Ils n’admettront jamais qu’ils se sont trompés sur votre compte puisqu’ils ont besoin d’une personne pour incarner l’ombre de la famille et s’il le faut, ils feront le nécessaire pour vous rendre au silence car pour une famille narcissique, les apparences sont plus précieuses que le bien-être de chacun.
Me croyez-vous si je vous dis, que bien que vous vous retrouviez à être la victime, paradoxalement, vous portez en vous une force que personne d’autres dans la famille ne possède ? Pourquoi, parce que le bouc émissaire est presque toujours le membre le plus sain du système familial. Parce qu’il n’est pas donné à tout le monde de refuser de participer au déni commun. Grâce à votre chemin de guérison, il se pourrait, qu’in fine, un cycle finisse par se briser parce que lorsque le bouc émissaire se reconnecte à son individualité, il n’est plus possible de lui faire porter le chapeau.
Elixirs floraux en lien avec la blessure du bouc émissaire
Simples d’utilisation, les élixirs n’en sont pas moins efficaces. Ils sont en mesure de nous accompagner à chaque étape de notre vie et nous aident à nous recentrer vers qui nous sommes vraiment. Tel une opportunité supplémentaire pour prendre du recul face aux épreuves qui surgissent, notre quête de déconditionnement s’en trouve renforcée. Je vous accompagne dans vos choix d’élixirs de façon à trouver ceux qui correspondent précisément à vos besoins. N’hésitez-pas à m’exprimer vos demandes durant vos consultations.
- Elixir d’agripaume (catégorie des élixirs Hollandais BLOESEM) : Cet élixir est spécifique pour le rapport avec la famille. Il est recommandé à ceux qui ne se sentent pas à l’aise parmi les leurs ou qui se sentent nerveux dans le cercle familial. Ils n’ont pas reçu suffisamment de chaleur et ne ressentent pas le sentiment d’appartenance alors ils se sentent comme étranger.
- Elixir de Dagger hakea (catégorie des élixirs du Bush australien) : Il aide à se libérer du ressentiment que l’on ressent à l’égard des membres de sa famille ou de tout autre proche. Il accompagne vers le pardon et facilite l’expression ouverte de ses sentiments.
- Elixir du détachement (catégorie des élixirs floraux de Flora) : Un composé de 9 fleurs, dont l’Armoise qui contribue à considérer les coups durs comme une chance d’évolution. Avec ce composé, vous pourrez accepter plus facilement ce qui est et développer la confiance en votre propre force. Vous ne craindrez plus de regarder vos attachements pour ce qu’ils sont, vous prendrez du détachement sans craindre la solitude et avec beaucoup de recul. Vous prendrez de la hauteur avec votre contexte et trouverez la bonne distance sans culpabiliser.
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